Dans sa baignoire, en écoutant « Ophélie » d’Arthur Rimbaud, Émilie met fin à ses jours. Son fantôme reste attaché à l’immeuble dans lequel elle est morte. Guidée par un chat qui peut voir les esprits, affranchie des limites terrestres, elle traverse les murs et part à la découverte de ses voisins. Ses pérégrinations éthérées la portent chez un dandy qui a le pouvoir de convoquer dans le monde réel quelques figures de la littérature, une petite fille prisonnière d’une pièce secrète et surtout un jeune peintre romantique dont elle était secrètement amoureuse …

Hôtel particulier est une envolée lyrique et poétique doublée d’un hommage sensuel à la littérature. Dès le début de l’histoire, la poésie de Rimbaud prend corps, s’incarne dans une jeune femme qui dit adieu à la vie et s’envole au-dessus des toits. Parfois, c’est le conte cruel qui est convoqué, tout comme le polar, la fantasy et les romans de cape et d’épée. Aucune littérature n’est laissée de coté.

L’écriture elle-même est poétique, les dialogues enlevés. Le dessin, dans une arabesque de gris confine à l’œuvre d’art. Chaque visage, chaque mouvement est dansant et expressif. Les corps se cachent, se voilent, meurent, renaissent, s’envolent, se croisent, s’apprivoisent et se confondent dans une frénésie qui donnent le tournis.

Et même, si la bande-dessinée parle de la décrépitude et de la mort, elle célèbre la vie, l’amour et l’art sous toutes ses formes. Cet Art qui nous emplit, qui nous affranchit des limites de l’espace et du temps et nous rend immortels.

Pour moi, Hôtel particulier est un chef d’œuvre.